25 juin 2021

Indemnisation de la faute inexcusable : les juges du fond doivent démontrer en quoi les souffrances physiques et morales sont distinctes de celles réparées au titre du déficit fonctionnel permanent

► Il résulte des articles L. 434-1 (Numéro Lexbase : L8918KUT), L. 434-2 (Numéro Lexbase : L8917KUS), L. 452-2 (Numéro Lexbase : L6533ACX) du Code de la Sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; sont réparables en application de l’article L. 452-3 du Code de la Sécurité sociale (Numéro Lexbase : L5302ADQ), les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; à cette fin, les juges du fond doivent démonter en quoi les souffrances physiques et morales endurées par la victime étaient distinctes de celles réparées au titre du déficit fonctionnel permanent.

Les faits et procédure. Un ancien mineur de fond a adressé une déclaration de maladie professionnelle (silicose) à la Caisse autonome nationale de Sécurité sociale dans les mines. Cette dernière a pris en charge cette maladie et a reconnu un taux d’incapacité partielle de 5 %, porté à 70 % à la suite du diagnostic d’un cancer broncho-pulmonaire.

La victime a alors saisi une juridiction de Sécurité sociale d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et, après son décès, ses ayants droit ont repris l’instance.

La cour d’appel. Pour fixer à une certaine somme l’indemnisation des souffrances physiques et morales endurées par la victime, la cour d’appel relève que la silicose dont celle-ci était atteinte a évolué vers une pathologie plus grave, à savoir un cancer broncho-pulmonaire primitif ayant conduit à une réévaluation de son taux d'incapacité permanente partielle, et que l’intéressée a subi de lourds traitements visant à combattre et à faire régresser ce cancer. L’arrêt retient ensuite que les souffrances physiques et morales liées à ces soins et à leurs effets secondaires ont constitué un préjudice distinct qui n'a pas été indemnisé par la rente servie à la victime jusqu'à son décès (CA Metz, 7 février 2019, n° 17/02210 Numéro Lexbase : A3345YWS).

S'agissant des souffrances morales, l’arrêt relève, en outre, que la victime était âgée de 66 ans quand a été posé le diagnostic d'une pathologie irréversible due à la présence de poussière de silice dans ses poumons. Puis il retient que la forte inquiétude causée par l'annonce d'une telle maladie et la conscience de son origine avec le risque d'évolution qu'elle comportait vers une pathologie plus grave mettant en jeu le pronostic vital, a constitué un préjudice spécifique, distinct de celui réparé au titre du déficit fonctionnel permanent et devant être indemnisé en tant que tel.

Cassation. Rappelant les règles prévues en matière d’indemnisation de la faute inexcusable, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : L'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, La faute inexcusable, in Droit de la protection sociale, Lexbase (Numéro Lexbase : E56114QU).


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